Tout est une question de perspective. Lorsque nous avons demandé à la responsable du camping où se situait le terrain de jeux pour les enfants, elle nous a répondu qu’il n’y en avait plus, mais que les enfants pouvaient creuser partout où il y avait du sable. Lorsque nous lui avons demandé si on pouvait faire un feu, elle nous a répondu que ce n’était pas possible car ils avaient été évacués cinq fois dans les deux dernières années pour les feux de forêt. Après les procédures d’inscription, elle a rajouté que c’est la saison des moustiques et des ours donc toute nourriture doit être rangée après le coucher du soleil et nous conseille d’être prudent sur le site. Nous avons probablement poussé notre chance lorsque nous avons demandé quelle était la condition de la route 510 de la Trans-Labrador Highway. Se doutant même avant de poser la question que la réponse serait probablement négative : Elle nous répondit qu’il y avait eu un accident mortel dans les derniers jours!
Pendant un instant, nous nous sommes remis en doute concernant notre choix de vacances estivales mais tous ces facteurs font partis de l’aventure et nous aimons l’aventure. Nous étions dans le seul camping de Happy Valley-Goose Bay, Labrador, au 53e parallèle. Dernier endroit pour faire les réserves de carburant et de nourriture avant de traverser un des plus longs tronçons de route sans services en Amérique du Nord.
La Trans-Labrador Highway traverse le Labrador d’ouest en est sur une distance approximative de 1200 kilomètres, dont environ 60% sur une surface de gravier. La dernière section, appelé 510, reliant Goose Bay à Red Bay a été complétée il y a environ 5 ans. Ce qui nous donne une boucle très intéressante de 5000km, si l’on revient en traversant Terre-Neuve, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick. C’est pour cette version que nous avons optée.
Notre périple avait commencé quelques jours plus tôt avec notre premier arrêt pour la nuit à Manic 5 et ainsi profiter de la visite gratuite des installations hydro-électrique. Le Barrage, qui est le plus grand à voûtes multiples du monde, est très impressionnant avec sa longueur de 1,3 kilomètre et son réservoir de deux milles kilomètres carrés. Aussitôt la visite terminée, nous avons repris la route, direction Fermont. À mi-chemin, l’ombre de Gagnon-ville plane toujours et des terrepleins apparaissent au centre de la route. Cette ville minière, qui a été complètement rasée dans les années 80, nous laisse perplexe et on se prend au jeu d’imaginer où se situaient les bâtiments principaux. Les sections de routes pavées sont en très mauvais états et nous attendons avec impatience de rouler sur le gravier.
Peu avant l’arrivée à Fermont, le paysage lunaire de la mine du Mont Wright nous donne un avant goût de l’ampleur des travaux miniers de la région. Le camion de 250 tonnes installé à l’entrée de la ville fait le plaisir de tous les visiteurs et difficile de résister à la tentation de prendre une photo. Il n’y a qu’un seul camping à Fermont, constitué à 99% de saisonniers et nous somme les seuls représentants du 1%. Fraichement construit, ce camping a battu le record du meilleur ratio qualité/prix : 15$ avec tous les services, douches gratuites et du bois à volonté.
Nous avions prévu partir tôt pour franchir la section de 600km entre Fermont et Goose-Bay, ne sachant pas en quel état serait la route. À notre grande surprise, la route est pavée sur plus de 80% et en très bon état. Nous avons croisé plusieurs sections qui ont été ravagées par les feux de forêt et en avons profité pour expliquer aux enfants l’ampleur que peut prendre une négligence à ce sujet. Étant à jour dans notre itinéraire, nous prenons une journée de repos pour visiter la région de Happy Valley- Goose Bay.
Une des règles fondamentales d’un Overlander est : Si vous cherchez quelque chose, demandez aux locaux! C’est ainsi que nous nous sommes retrouvés à North River, dans une communauté autochtone, sur une magnifique plage de sable blanc au grand plaisir de toute la famille. Après une belle après midi de baignade, quoi de mieux qu’un bon repas au restaurant pour fêter le petit dernier de la famille. Encore une fois, suite à une discussion avec les gens de la place, nous avons fait la découverte du restaurant Jungle’s Jim qui nous a conquis avec son décor semi-Hawaï, semi-Safari et un service hors-pair.
Il était maintenant le temps de reprendre la route afin de compléter la dernière section de la Trans-Labrador. Selon nos informations, la distance avant le prochain ravitaillement de carburant serait de 400km, apporter deux Jerry cans supplémentaires semblait une bonne idée. Cette section est 100% gravier jusqu’à Red Bay mais très bien entretenue. Il y a trois haltes au fil de la route pour se dégourdir et plusieurs rivières pour taquiner le poisson. La végétation et le paysage changent du tout au tout lorsque l’on se rapproche de notre objectif et les petits villages de pêcheurs comme Mary Harbour et Port Hope Simpson font leur apparition. Apercevoir la côte et une aussi vaste étendue d’eau, en arrivant à Red Bay, est quelque peu déstabilisant après autant de kilomètres de routes forestières mais très satisfaisant.
Le parc provincial de Pinware est le plus proche de Red Bay et nous y restons pour deux nuits. Situé directement sur le bord de l’eau, à l’embouchure d’une rivière à saumon, Pinware est l’endroit où les moustiques ont été les plus voraces même par grand vent. L’accès à la plage est directement sur le site, ce qui a donné un immense terrain de jeu aux enfants et de somptueux couchers de soleil. Nous en profitons pour aller visiter le site historique des baleiniers basques reconnu par l’UNESCO et déguster un des meilleurs Fish&Chip au monde chez Whaler’s, accompagné d’une Iceberg, bière locale. Les vestiges des chasseurs de baleines se retrouvent un peu partout et on trouve quelques os de baleines le long des sentiers pédestres du littoral.
Nous avons continué notre route jusqu’à Blanc-Sablon, point final de la Trans-Labrador Highway. Fidèles à nos habitudes, nous n’avions pas réservé notre place sur le traversier pour se rendre à Terre-Neuve. Nous avons donc attendu une journée complète en espérant qu’une petite place se libère pour nous. Loin d’être dans la misère, nous avons trouvé un coin tranquille près du quai d’embarquement pour passer la nuit au besoin et pour se préparer un bon repas sur feu de bois.
Notre traversée du Labrador est, sans contredit, une de nos plus belles expériences d’overlanding et nous la recommandons fortement. Nous avons la chance d’avoir, près de chez nous, cette route qui ressemble sur plusieurs points à la prestigieuse Dempster Highway. Il y a parfois peu d’informations sur cette route car elle n’est pas sur toutes les cartes mais vous pouvez consulter les liens ici-bas ou tout simplement communiquer avec nous par notre page Facebook : Expédition Nord Sud.
-tlhwy.com
-Sur google et rechercher le fichier : trans_labrador_highway_guide_may_2012.pdf